Avant j'étais triste et Gay ? boutades qui ne craignent pas le choc de l'image et du mot... et optent pour l'attaque souriante.

 

Deux vidéos des plus brèves mais tout aussi efficaces attaquant l'homophobie déniée, celle qui au nom du consensus accepte(rait) la différence d'attrait sexuel et qui, pour preuve, a un ami qui... J-G. Périot s'emploie à dévaster cet aimable refus. Ainsi le premier titre use de l'imparfait qui implique un changement du « je » énonciateur vers le bonheur ; il lance la description du passé dépassé puisque inducteur de tristesse en une biographie réduites aux étapes normées mais engluées de clichés, du portrait de l'homosexuel, l'habitat chez maman, l'écoute de Dalida... ou moins normées « les copains pédés » et le quartier du Marais avant les solutions / le renversement total pour trouver le bonheur ; le PACS et l'adoption de deux enfants avec vacances à Oléron, maison, voiture, tartines de Nutella et achats de vêtements chez C&A, annulent les regards négatifs des collègues de bureau, voire les conduisent à boire ensemble de la bière. Cela serait l'acceptation sociale du contrat de vie entre homosexuels, si ce n'est que, se souvenant de la fonction de la chute du court métrage, les dernières images inscrivent le visage et le nom féminins de Sylviane « qui est bien gentille » alors que le caniche se glisse sur le canapé où sourit le couple. Ainsi le bonheur n'est que dans l'adoption de la logique sociale définie pour / par l'hétérosexualité.

Pour preuve l'antiphrase en forme de slogan conatif ponctue ces deux minutes de dérision : « L'Hétérosexualité c'est l'avenir des gays. » Dans cet esprit gouailleur, loin de tout didactisme, semblant accepter ce qu'elle refuse, la vidéo adopte un ton fleur bleue avec la couleur rose et le cœur volant pour la seconde période, après le gris des vêtements sous fond jaune des médaillons de la première ... Un ton moqueur en optant pour la reprise pour chaque visage - hormis celui de la mère et de la femme et certes de ses amants en positions très explicites - de celui du réalisateur avec ou sans lunettes pour distinguer ses enfants, pour le « je » comme pour ses collègues à chaque fois grossièrement détouré et opinant de droite à gauche à la manière d'une marionnette en deux dimensions. Animation de photos découpées exhibant l'hypocrite parole sociale.

Gay ? ou une autre définition. La seconde vidéo y va directement, sans chemin détourné, elle efface le romantisme que de nombreux affectent à l'homosexuel, autre manière de le refuser. En plan fixe, frontal annulant le hors cadre, Jean-Gabriel Périot, en plan rapproché poitrine, censé s'adresser pour son coming out à sa famille, à sa boulangère comme à son libraire, devant des étagères qui ne refusent pas les ouvrages d'art, se penche vers l'auditoire - par définition - absent et se désigne par le familier raccourci « Gaby ». Sans hésitation, il dépasse les paroles « attendues », en décrivant ce qu'il aime pratiquer sexuellement, faire ou recevoir, au-delà de l'idée de raffinement prêté aux « jolis couples », raffinement, délicatesse qui ne sauraient être liés à telle ou telle préférence sexuelle. Efficace retour à la réalité du vécu et à la nécessité d'être reconnu et accepté comme tel sans mythologie.

 

Par Simone Dompeyre
Traverse Vidéo 2006